Lors des campagnes présidentielles des Etats-Unis, seuls les Américains votent, mais chacun se sent concerné. Il en allait de même avec la « conversation » entre Elon Musk et Donald Trump, sur X. Le candidat républicain à l’élection de novembre faisait son grand retour, lundi 12 août, sur le réseau social – désormais propriété du fondateur de SpaceX et de Tesla – dont l’ancien président avait été banni après l’assaut du Capitole, à Washington, le 6 janvier 2021.

Avant le show, le commissaire européen Thierry Breton s’était invité en envoyant une longue mise en garde à M. Musk, lui enjoignant de respecter les lois européennes et précisant que les règles de modération le concernaient aussi. « Fais un grand pas en arrière et va te faire mettre [“Fuck your own face”] », a élégamment répondu le milliardaire en postant une image.

Le directeur de communication de Donald Trump, Steven Cheung, dénonce l’ingérence : « L’Union européenne devrait s’occuper de ses propres affaires au lieu de tenter de s’immiscer dans l’élection présidentielle américaine. Ce n’est que dans l’Amérique de Joe Biden et de Kamala Harris qu’une organisation étrangère non démocratique peut se sentir suffisamment enhardie pour dire à ce pays ce qu’il doit faire. »

Le précédent Ron DeSantis

A 20 heures, lundi soir (2 heures à Paris), le streaming pouvait débuter. Voyant depuis la veille Elon Musk tester la résistance de son réseau, chacun avait oublié le bug technique qui avait marqué, en mai 2023, les débuts calamiteux du gouverneur de Floride, Ron DeSantis, alors candidat à l’investiture républicaine. Mais en essayant de se connecter, avant 20 heures, arrive un petit singe : il est impossible d’écouter la discussion. Le milliardaire Bill Ackman, qui soutient Trump, supplie sur le réseau : « S’il vous plaît, faites savoir à Elon que nous ne pouvons pas nous joindre à lui ». Avant de s’indigner : « C’est l’empire du mal qui met un terme à la liberté d’expression une fois de plus. »

A 20 h 18, Elon Musk annonce finalement être victime d’une cyberattaque. « Il semble y avoir une attaque de déni d’accès (DDOC) massive sur X. Nous y travaillons. Dans le pire des cas, nous procéderons avec un nombre réduit d’auditeurs en direct et nous publierons la conversation plus tard », poste-t-il avant de préciser : « Nous avons testé l’événement avec 8 millions d’auditeurs aujourd’hui. » La réalité de l’attaque n’est pas confirmée, alors que le réseau X continuait de fonctionner normalement.

A 20 h 30, on est admis sur la plate-forme pour entendre une petite musique en boucle, puis un silence. A 20 h 40, enfin, l’entretien peut commencer.

Détestation de l’immigration illégale

En réalité, la partie excitante de la soirée est passée. La « conversation » confirme que l’interview politique est un métier, mais réjouit ceux qui estiment, tel l’investisseur Mark Minervini, que les deux hommes ont discuté comme M. Tout-le-Monde.

Sans contradiction, Donald Trump et Elon Musk, immigré d’Afrique du Sud, étalent leur détestation de l’immigration illégale à la frontière avec le Mexique, s’inquiètent de la menace nucléaire et de la troisième guerre mondiale, disent du mal des Européens.

L’Elon Musk qui claquait la porte, en 2017, d’un groupe de conseillers de Trump parce que ce dernier avait quitté l’accord de Paris sur le climat peine à défendre la lutte contre le réchauffement et laisse son interlocuteur dire que la montée des eaux, insignifiante selon lui, permettra d’avoir plus de résidences au bord de l’océan.

L’entrepreneur cherche bien à embarquer le candidat républicain sur un audit des dépenses publiques, mais Donald Trump répète surtout qu’il a obtenu de Boeing une baisse du prix d’Air Force One, l’avion avec lequel se déplace un président des Etats-Unis. A 22 h 36, le candidat républicain donne rendez-vous à Elon Musk au Venezuela, qui sera, selon lui, plus sûr que les Etats-Unis si les démocrates l’emportent en novembre. Au bout de deux heures et dix minutes, l’entretien, qui a été suivi par 1,2 million d’internautes, s’achève enfin.