C’est un communiqué du Quai d’Orsay, le 1er avril.

« La France exprime son émotion après la découverte des dépouilles de quinze secouristes du Croissant-Rouge palestinien (PRCS) et de la défense civile palestinienne, le 30 mars, décédés dans le cadre d’une opération militaire israélienne une semaine plus tôt alors qu’ils venaient porter assistance à des blessés. »

Comme le confirmera une vidéo réalisée par l’une des victimes sur son téléphone portable peu avant sa mort — et dont l’existence a été révélée le 5 avril —, les travailleurs humanitaires ne sont pas simplement « décédés ». Ils ont été assassinés.

Ces événements ne sont pas déroulés « dans le cadre d’une opération militaire » : le convoi d’ambulances, parfaitement identifiable avec ses gyrophares et ses sirènes hurlantes, faisait route pour secourir des civils bombardés à Rafah. Il a été poursuivi et intercepté par les militaires. Ses passagers arrêtés.

La « découverte » des « dépouilles » n’a été possible qu’une semaine après l’attaque (illégale) de l’armée israélienne, lorsque des collègues des secouristes ont enfin eu accès à la zone.

Quant à l’expression d’une « émotion », elle pouvait s’accompagner d’une condamnation et de l’exigence d’explications adressées aux autorités israéliennes — ignorées dans le communiqué.

À la suite des massacres perpétrés par le Hamas dans le sud d’Israël le 7 octobre 2023, la diplomatie française a effectué un virage sur l’aile. D’une part, en adhérant largement au discours du gouvernement d’extrême droite dirigé par Benyamin Netanyahou, d’autre part en manquant à ses obligations de base. De Charles de Gaulle (1958-1969) au président Jacques Chirac (1995-2007), Paris défendait le droit du peuple palestinien à obtenir enfin l’État promis par les résolutions des Nations unies et rappelait avec force Israël à ses devoirs : se retirer des territoires occupés en 1967 et respecter ses responsabilités de « puissance occupante » en Cisjordanie et à Gaza.

Depuis le déclenchement de l’offensive israélienne à Gaza, la violation répétée — parfaitement établie par de multiples rapports d’organismes des Nations unies et d’organisations non gouvernementales — du droit international humanitaire ne provoque que de molles condamnations. Celle, par exemple, de l’utilisation de l’aide humanitaire comme « instrument de guerre », par le président Emmanuel Macron en Égypte, le 8 avril. Cette retenue tranche avec la netteté et la fermeté — justifiées — des réactions aux crimes commis par l’armée russe en Ukraine.

Avocate historique de la Cour pénale internationale, la France a autorisé, dans la nuit du 6 au 7 avril 2025, l’avion de M. Netanyahou, pourtant sous mandat d’arrêt, à survoler son territoire pour se rendre à Washington.