Deux syndicalistes membres de la CGT du Nord, parmi lesquels le secrétaire départemental, ont été interpellés vendredi 20 octobre à leur domicile pour apologie du terrorisme, a appris l’Agence France-Presse (AFP) auprès du syndicat et d’une source proche du dossier. Leurs gardes à vue, qui ont duré toute la matinée, ont été levées aux alentours de 13 h 30. L’enquête « se poursuit », a fait savoir le parquet de Lille à l’AFP, sans autre précision.
Selon Stéphane Vonthron, représentant du bureau de la CGT dans le Nord, le secrétaire départemental Jean-Paul Delescaut ainsi qu’une salariée ont été interpellés « à 6 h 20 chez eux par des policiers cagoulés pour apologie du terrorisme, en raison [du] soutien [de la CGT du Nord] au peuple palestinien ». La CGT a pour sa part précisé sur X (ex-Twitter) que les deux arrestations « sont probablement liées au conflit israélo-palestinien, même si à ce stade, [elle ne sait] pas précisément ce qui leur est reproché ».
« Soutenir pacifiquement le droit des Palestiniens ne peut pas être aussi grossièrement caricaturé et criminalisé », a ajouté la centrale syndicale. Selon la source proche du dossier, les deux arrestations font suite à un tract de soutien aux Palestiniens diffusé le 10 octobre. Une phrase est particulièrement mise en cause : « Les horreurs de l’occupation illégale se sont accumulées. Depuis samedi, elles reçoivent les réponses qu’elles ont provoquées. » Le préfet du Nord, Georges-François Leclerc, avait interdit trois manifestations propalestiniennes sur la base de ce tract, entre autres.
Les policiers « considèrent que le tract a une forme d’apologie au terrorisme et d’appel à la haine », a expliqué l’avocat des gardés à vue, Ioannis Kappopoulos. « On a rappelé ce matin que l’organisation CGT n’était pas liée au terrorisme, qu’elle n’était pas pour le terrorisme et qu’elle était là pour représenter les travailleurs partout dans le monde », a déclaré à sa sortie Jean-Paul Delescaut, en dénonçant « un tribunal politique ».
Une soixantaine de militants CGT étaient rassemblés vendredi matin devant le commissariat de Lille, protégé par un cordon policier, pour demander la libération de leurs deux camarades, a constaté un journaliste de l’AFP, jusqu’à la levée de leur garde à vue. Des réactions indignées à gauche
En déplacement à Bordeaux, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, a dit qu’il s’agissait d’« une interpellation scandaleuse ». « Rien ne nécessitait une garde à vue et un tel emploi de la force (…), comme si c’étaient des terroristes, a-t-elle ajouté. Nous sommes très inquiets du glissement et de la dérive en matière de liberté d’expression, et de libertés tout court. »
« “Apologie du terrorisme”, qui peut le croire ? L’apologie du terrorisme, c’est le soutien inconditionnel du gouvernement aux crimes de guerre à Gaza », a réagi sur X (anciennement Twitter) le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon. « Si je ne partage pas le tract qui lui est reproché, je n’accepte pas qu’on traite un syndicaliste comme un terroriste ! Solidarité », a de son côté déclaré le patron du Parti communiste français, Fabien Roussel. Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a interpellé Gérald Darmanin : « C’est pour exercer nos libertés que nous nous battons face au terrorisme, pas pour les supprimer ! »
« La phrase visée dans l’appel à manifester ne justifie pas la qualification d’apologie du terrorisme », a également estimé Sarah Kerrich, première secrétaire fédérale de la fédération du Nord du PS, en ajoutant : « Si nous ne partageons pas leur entière analyse sur le conflit, nous ne pouvons pas tolérer l’intimidation judiciaire qui est actuellement à l’œuvre. »
Sophie Binet, avait condamné « clairement » les attaques du Hamas le 8 octobre sur France Culture, « tout simplement parce que ce sont les civils qui vont en être les premiers pénalisés, notamment les civils palestiniens ». Membre du Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, la CGT a appelé à un grand rassemblement sous le slogan « Halte au massacre » dimanche, à 15 heures, sur la place de la République de Paris.
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